C'était un étrange phénomène qui lui arrivait là. Pour la première fois depuis des décennies, Asher avait l'impression de rêver. En effet, comment expliquer sinon le fait d'être arrivé d'un coup dans cet enfer.

Un instant, il était dans son appartement à Tokyo et l'instant d'après, sans trop savoir comment, il était là, dans cet endroit inconnu où il n'y avait rien à perte de vue sinon des kilomètres et des kilomètres de neige. Et là, il gelait car qui que soit l'être qui l'avait envoyé si loin, ne lui avait guère laissé l'opportunité de prendre quoi que ce soit de chaud. Et il se retrouvait dans ce froid hivernal avec juste une chemise, un pull léger et des mocassins. D'ailleurs, la première pensée qu'il eut en arrivant fut pour ses mocassins en cuir qui étaient définitivement perdues avec toute cette neige.

Ensuite, quand le choc fut bien passé, il ressentit une vive colère à l'égard de cet ignoble individu qui l'obligeait à risquer sa "vie". Puis, le froid aidant, il se calma et commenca à ressentir de la peur:

Que faire seul dans cet endroit totalement désolé?

Il savait de quelle direction il était venu ni celle qu'il lui fallait prendre pour repartir. Et plus important, malgré sa grande résistance (pour un vampire) au soleil, dans cet environnement, il risquait très certainement de vite s'affaiblir s'il ne trouvait pas rapidement de refuge pour la journée.

Il se mit donc en marche vers une quelconque direction, en priant pour que celle-ci soit la bonne ou qu'au moins elle le mène quelque part. Au fur et à mesure qu'il avançait sa vitesse accrut car l'aube pointait et il n'y avait toujours pas d'abri en vue. Tout ce qu'il voyait c'était de la neige, encore et toujours.
Juste quand il commença à désespérer, il vit à quelques kilomètres de sa position des arbres qui semblaient marquer les limites d'une forêt.
Si la chance lui souriait, celle-ci serait assez épaisse pour étouffer la plupart des rayons du soleil. Dans cet endroit où tout était si blanc, la réverbération décuplait les effets du soleil et malgré sa résistance, même Asher ne pourrait faire face à un tel ennemi naturel. Même de nuit, les rayons de la lune était assez puissante pour l'affaiblir, pas assez pour qu'il soit aux bords de la mort, mais tout de même assez pour saper une partie de ses forces.

Qui plus est, comme si ses soucis n'étaient assez important, son ravisseur n'avait pas non plus juger opportun d'attendre qu'il ait fini son dîner pour l'enlever: la faim l'affaiblissait également. Il maudit intérieurement cette personne, en se hâtant toujours plus vite vers le couvert de la forêt. Il espérait vraiment trouver là d'abord un refuge et ensuite s'il le pouvait un indice sur cet endroit et les raisons de sa venue.

Dans la demeure des défunts parents du jeune Kei Kyura, l'ainée de la famille Nii devait faire face à l'un de ses pires ennemis. Envahissant les parcelles encore libres de la chambre des invitées, occupée par Kitsune, les vêtements et les achats impulsifs de celle ci se répandaient à une vitesse incroyable. Il était impossible de distinguer le lit, puisque celui ci était enfoui sous une multitude de robes de toutes sortes. Quant à se déplacer dans la chambre, il ne fallait même pas y compter. Ayant toujours considéré le rangement comme une corvée, elle le repoussait toujours au lendemain, du moins jusqu'à présent. Le désordre avait atteint une telle ampleur qu'il menaçait de s'étendre au reste de la maison, ce qui était catégoriquement inconcevable. Elle était déjà logée gratuitement. La moindre des choses serait alors de ne pas créer le chaos dans la maison. Elle finit alors par retrousser ses manches et à s'attaquer aux piles de vêtements. Mais elle eut une première mauvaise surprise en apercevant que l'armoire était déjà pleine à craquer. Kei y avait surement rangé les vestes et blousons encombrants de ses parents. Toutefois, elle essaya de faire de la place entre les habits, lorsqu'elle reçut soudain un flocon de neige sur le bout de son nez. Un flocon de neige ? Kitsune n'en revenait pas ! Comment une chose aussi éphémère avait réussit à survivre dans un tel endroit ? Pendant un instant, elle crut avoir rêvé. Mais un soudain flocon, suivi d'une légère brise glaciale, firent disparaitre ses doutes. Sans crier garde, la brise devint un vent fort qui finit par aspirer littéralement la renarde ainsi que quelques vestes. Alors qu'elle pensait percuter violemment le fond de l'armoire, elle se retrouva projetée dans une terre enneigée la tête en avant. Ayant auparavant accepté avec difficulté l'idée que des flocons de neiges pouvaient se former au sein d'une vieille armoire, le fait de se retrouver allongée dans la neige était tout bonnement inimaginable ! Elle devait s'être assoupie en plein ménage ! C'était la seule explication logique. D'ailleurs l'armoire avait disparue, comme par magie. C'était donc clair qu'il s'agissait pour Kitsune d'un rêve. Par contre, ce rêve était glacial ! Gelée, elle se jeta telle une affamée sur les vestes et blousons qui l'avaient suivie et les enfila tous, l'un au dessus de l'autre. Par chance, les vestes étaient assez longues pour lui tenir chaud jusqu'aux genoux. Par contre, aucune père de bottes ne l'avait suivi dans son voyage improvisé. Le résultat visuel était certes ridicule, mais au moins elle ne mourait plus de froid. Ainsi, ressemblant de loin à un énorme bonhomme des neiges, Kitsune se frayait un passage dans cette forêt enneigée. Espérant se réveiller rapidement, elle ne savait vraiment pas quoi faire. Elle ne savait ni où elle était, ni où elle devait aller. Mais de toute manière, s'il s'agissait d'un rêve, elle n'en avait que faire. Elle finirait bien par se réveiller. Elle s'adossa alors sans motivation à un arbre, cherchant au loin un signe de vie quelconque. Il faut dire qu'elle était loin de se douter, qu'à quelques mètres à peine, un jeune homme se dirigait vers elle, embarqué lui aussi de force dans cette même galère.

- Allez réveille toi petite idiote ! Tu as du ménage qui t'attend...

Nul n’ignore qu'il est conseillé de se montrer d'une courtoisie irréprochable, lorsque l'on souhaite obtenir l'aide d'une demoiselle. La flatterie est d'autant plus efficace, mais une utilisation exagérée risque d'entrainer la suspicion de la jeune femme. Toutefois, qualifier une femme de monstruosité vouait toute tentative à l'échec. C'était certainement ce manque de tact qui avait gelé le cœur de la renarde, exposant sa rancœur au grand jour.

- Qui vous dit que je vais vous venir en aide ? Vous l'avez signalé à juste titre, je ne suis qu'une monstruosité. Je vous souhaite d'avoir de meilleure chance avec le prochain énergumène que vous croiserez, si prochain il y a bien évidemment.

Kitsune décida de couper radicalement le contact, par un croisement de bras et en tournant le dos à son interlocuteur. Il n’avait pas qu’à me traiter de monstruosité… Mais elle finit tout de même par faire abstraction de ses sentiments, en offrant son aide. Elle retira l’une de ses vestes et l’enfila à l’homme, sans attendre son approbation. Après tout, personne ne souhaiterait mourir de froid. Une fois débarrassée d’un de ses épais manteaux et après avoir retiré sa capuche, l’apparence de la renarde redevint quelque peu normale. Du moins, on ne la confondrait plus avec un yéti ou autre monstre des montagnes.

- Veuillez m’excuser pour mon attitude, mais… je ne suis pas une monstruosité. Enfin, oublions cette histoire. Je vous excuse, à condition que vous vous montriez plus… galant.

Même en terres inconnues, où survivre est la priorité, Kitsune trouvait le temps de faire ses caprices… Toutefois, elle était à présent d’humeur coopérative. Il est dommage qu’elle n’en sache pas plus que son compagnon d’infortune sur ce lieu et encore moins sur la raison de leur présence ici. Ils étaient tout deux dans la même galère…

- Je suis désolée, mais je n’en sais pas plus que vous. Il y a moins d’une heure, j’étais encore chez moi. Mais… Ne vous moquez pas ! Mais je suis tombée dans mon armoire et j’ai atterri ici. Cela explique la présence de tous ces manteaux. Vous pouvez gardez celui que vous avez sur les épaules. Vous sembliez mort de froid, il vous réchauffera un peu. Et puis en plus, il vous va bien Hi Hi. Au fait, je m'appelle Kitsune Nii, mais appelez moi comme vous voulez, du moment que vous prenez garde au surnom que vous choisirez.

Finalement rassurée de ne pas être seule dans ce no man land, Kitsune retrouva sa bonne humeur, Kitsune finit par enfin sourire, dévoilant ses canines blanchâtres. Elle attrapa la main de son compagnon. Apercevant qu'il ne comprenait pas vraiment ce soudain rapprochement, elle lui dévoila ses craintes.

- C'est juste pour ne pas que l'on se perde ! Enfin, je veux dire que... Si jamais il y a une tempête de neig eou un éboulement, il vaux mieux que l'on se tienne la main. Non ? - apercevant le scepticisme de son interlocuteur, elle finit par lui dire enfin la vérité - En fait, j'ai peur...